La méthode du coût d’évitement (ou de dépenses de protection)

Puisque le marché ne permet pas une évaluation « spontanée » des valeurs environnementales, on peut chercher à identifier des comportements économiques qui reflètent indirectement le CAP des individus. Cette méthode a alors pour but d’estimer les « coûts d’évitement », c’est-à-dire correspondant aux coûts des mesures qui peuvent être envisagées pour éviter tout ou partie des dommages, et peut être illustrée par les surcoûts visant à réduire l’impact des nuisances : c’est, par exemple, le coût de l’installation de pots catalytiques ou des filtres à particules sur toutes les voitures neuves dans le cas de la pollution atmosphérique, ainsi que les traitements supplémentaires ou les technologies de production alternatives auxquels doivent faire face les industriels, du fait des normes d’émissions qui ont été établies et qui sont progressivement renforcées au niveau national ou européen. Ces coûts seront ensuite répercutés dans le prix de vente de ces biens aux consommateurs, initialement victimes de ces dommages. Par l’observation de certains marchés de substitution, on cherchera donc une évaluation monétaire indirecte de ce CAP. Si les individus engagent des dépenses pour se protéger de la pollution, et de ses effets sur leur santé, ou obtenir une amélioration de leur environnement, on peut estimer qu’ils expriment ainsi un CAP, soit directement – en se prémunissant, ou indirectement – en achetant des biens moins polluants mais à un prix supérieur. Il suffirait donc d’évaluer ces dépenses.

Cette approche a d’abord été développée par Starkie et Johnson [1] dans le but d’évaluer le coût social du bruit en Grande-Bretagne. Les auteurs sont partis de l’observation que les individus investissent dans des équipements de protection contre les bruits extérieurs, notamment par l’installation de double vitrages ou doubles fenêtres. Ainsi, un individu choisira d’acquérir des dispositifs de protection si l’expression C < (N-N’), où C représente le coût de l’isolation acoustique, N l’évaluation subjective de la nuisance causée par le bruit en l’absence d’isolation acoustique, et N’ l’évaluation subjective du bruit après isolation. On choisira donc d’acquérir des équipements de protection lorsque les avantages de cette protection (N-N’) sont supérieurs aux coûts (C) et l’on acceptera de dépenser pour l’isolation jusqu’au niveau : AN - AN’ = AC, où A représente des petites variations (variations marginales). Le coût C est donc une expression du CAP pour se protéger contre une nuisance (ici, le bruit).

On peut tracer une courbe de demande pour la protection contre les nuisances mettant en relation la quantité de protection demandée et le prix de cette protection. La surface située sous la courbe représenterait le surplus du consommateur, c’est-à-dire les avantages procurés par la protection. En appliquant cette méthode à l’aéroport de Londres-Heathrow, Starkie et Johnson ont calculé un CAP, pour l’isolation acoustique d’une maison de cinq pièces, égal à environ 5% du revenu. Si l’on parvient effectivement à évaluer le CAP pour les dépenses de protection, cette méthode a le mérite de la simplicité et peut fournir des ordres de grandeur des dommages à l’environnement.

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Notes

[1D. N. M. Starkie, D. M. Johnson, The Economic Value of Peace and Quiet, Lexington, Saxon House, 1975.

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