Ce cours insiste moins sur les connaissances en soi que sur les conditions qui les rendent possibles. Il cherche à exprimer des arguments différents, que vous jugerez, convaincants ou pas, logiques ou non, en tout cas soumis au débat sur leur fondement et leur cohérence. De fait, il porte sur les manières de raisonner et non seulement sur la succession des propositions, inspirées de tel auteur ou écoles de pensée.
En partant d’une définition du risque (il y en pas qu’une seule) afin d’en dériver des règlements et procédures pour sa « gestion », par des experts bien sûr, nous faisons comme s’il s’agissait d’une vérité d’éternité, enfin découverte ou conquise par les modernes, en laissant de côté :
Pour nous aujourd’hui, la notion de risque est évidente et presque « naturelle », dès lors que ceux aux commandes la présentent non seulement comme incontournable, mais carrément en tant que facteur de développement, critère ultime du progrès (pour qui ?). Il ne s’agit pas de les abolir (une illusion), mais reconnaissant leur part de construction sociale, prendre en compte des situations (sociales) tendues entre positions qui s’affrontent. S’y mêlent les croyances en la croissance continue et autres « inventions », comme l’utilitarisme qui cherche à imposer un unique mode de calcul du bonheur (monétarisation) basé sur la maximisation de l’utilité égoïste par des individus informés.
Posons-nous la question : dans un monde où 1% des plus fortunés, captent depuis 2020, 63% des richesses produites, comme l’a révélé un rapport d’Oxfam, les termes du discours et les conditions du débat, social ou politique, autour de la notion de risque (une émergence du XIXème siècle), ne seraient-ils pas contrôlés par ceux (une petite minorité) qui ont le pouvoir de les imposer à la masse (subalterne) incapable de faire valoir ses arguments en dehors du cadre défini par les puissants, tant sur les finalités que les procédures, voire le vocabulaire ? Prenez une respiration. Une deuxième question émerge alors : doit-on saisir le risque exclusivement comme objet d’expertise scientifique ou doit-on l’asseoir sur un cadrage différent ? Ce cours cherche à discuter des réponses possibles, en tentant de décrire comment le risque s’est trouvé aussi profondément noué dans la trame de nos vie, avec des retombées pan-civilisationnelles. Dit plus simplement, n’y aurait-il pas des enseignements à tirer à partir de l’examen du comment nous en sommes arrivés là ?, suggérant le cas échéant de nouvelles pistes pour en sortir ?
En soulevant des interrogations successives, nous essayerons de reconceptualiser la notion de risque dans le champ social et non plus comme simple objet d’expertise, elle même donnant lieu à des controverses.
Pour y arriver, nous aborderons son émergence historique et comment il s’est installer au cœur d’une vision nouvelle, aboutissant à ce qu’Ulrich Beck a nommer, la Société du risque.
Enfin, en partant d’un champ social aux relations tendues, traversé par des rapports de domination, nous verrons comment autour du risque s’est greffé un débat sociétal, questionnant jusqu’à notre rapport à la Terre.