Capacité à payer et inégalités : l’intervention publique justifiée

Que le choix d’accepter une pollution plus élevée s’explique uniquement, ou essentiellement, par une capacité insuffisante à payer est beaucoup plus discutable. Bien qu’il existe un aspect subjectif dans la perception de certains dommages (bruit, pollution de l’air ou de l’eau), la plupart des dommages, et particulièrement les plus graves, comme les atteintes à la santé, frappent les pauvres comme les riches. La critique porte ici, on le voit, sur les conséquences d’une monétarisation propre à la logique de l’économie marchande, où l’exclusion se fait par la capacité à payer (c’est-à-dire « qui ne paie pas ne consomme pas ») ; ce qui est valable pour tous les biens marchands peut le devenir pour les biens d’environnement, à moins que l’on choisisse d’en assurer l’égalité d’accès, comme pour d’autres biens publics, par le biais d’un financement collectif. Faire payer l’usager, ou le contribuable, est un choix qui implique que l’on prenne en compte non seulement le critère d’efficacité, mais aussi celui d’équité. Par contre, une politique de lutte antipollution financée par la puissance publique pourrait en revanche être réductrice d’inégalités puisqu’elle bénéficierait surtout aux catégories défavorisées souffrant plus de la pollution. La répartition des coûts de dépollution dépendra alors de la structure de l’impôt et des répercussions de cette politique sur l’activité et l’emploi.

Toutefois, le raisonnement selon lequel une amélioration de la qualité de l’environnement bénéficierait relativement plus à ceux qui, plus défavorisés socialement, seraient les plus pollués n’est toutefois acceptable qu’à condition de mesurer cette amélioration en termes physiques. Si elle est mesurée en termes monétaires, il n’est pas certain qu’elle bénéficie plus aux pauvres qu’aux riches. En effet, si l’on fait l’hypothèse que la satisfaction retirée d’une augmentation de la qualité de l’environnement est plus grande pour les catégories favorisées, une politique d’environnement engendrant une répartition égale des avantages et des coûts bénéficiera plus aux riches qu’aux pauvres, en termes d’accroissement du bien-être mesuré en termes monétaires. Au plan international, cette conception reste encore dominante ce qui, dans le cas de la lutte contre une pollution globale comme l’effet de serre, suscite de vifs conflits d’intérêts entre pays pauvres et pays riches.

Enfin, les effets redistributifs des politiques d’environnement ne se limitent pas exclusivement à la génération présente, ils concernent aussi les générations futures, se traduisant par l’exigence d’une certaine solidarité entre les premières et les secondes.

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  • Si j’ai bien compris, on pense que une amélioration de la qualité de l’environnement bénéficierait relativement plus à ceux qui sont plus défavorisés (parce qu’ils sont les plus impactés). Mais si on mésure cela en termes monétaires, une intervention publique de repartition des bénéfices et des couts bénéficierait aux plus riches. Dans quel sens on peut affirmer qu’une répartition égale des avantages et des coûts bénéficiera plus aux riches qu’aux pauvres, en termes d’accroissement du bien-être mesuré en termes monétaires ?

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