La scène et ses groupes de figurants

Je ne choisi pas par hasard la métaphore théâtrale. La réglementation fait partie de l’intrigue, mais c’est les différents rôles que je veux préciser, avant de porter le regard sur les relations entre acteurs qui viennent occuper la scène et, plus généralement, les conditions du contexte qui influencent l’issue. Dans ce cas, la conclusion de la pièce n’est pas connue d’avance. Il y a donc mise en accusation, devant le juge, ce qui signifie qu’il y a plaignant et défendeur. En l’espèce, l’objet du litige est l’autorisation de mise sur le marché d’un pesticide. Elle est contestée, généralement par des organisations de la société civile. L’accusation est dirigée vers l’agence de sécurité sanitaire (l’ANSES pour la France), décisionnaire réglementairement en pareil circonstances, en évoquant le non respect d’une loi, ici une procédure administrative, ce qui explique qu’elle est portée devant les tribunaux administratifs.
La mise en cause repose sur des points scientifiques et procéduraux contre l’avis (expert) rendu par l’autorité compétente. C’est l’application des bonnes procédures, dans le respect de la loi (y compris les lignes directrices sur l’évaluation des risques) qui est visée. Évidemment, le mémoire en accusation, comportera des arguments scientifiques, comme juridiques. Il nous faut alors inclure les acteurs de seconde ligne (ce n’est pas leur importance que je vise mais leur visibilité) : juristes et scientifiques. Ce que nous montre l’examen de l’évolution du domaine est que, des juristes engagés [1] viennent défendre ou conseiller le plaignant, en même temps que des scientifiques, eux aussi engagés [2], s’élèvent contre la manière de l’application des critères scientifiques dans le travail des comités mobilisés pour produire l’expertise.
Nous devrions commencer à percevoir l’esquisse d’une affaire bien plus que technique, mobilisant des acteurs autour d’une problématique sociétale. La science sera mise en débat, puisque elle serait au fondement des procédures de l’agence. Pour autant le jugement s’appuiera sur l’interprétation de la bonne ou non application de la réglementation. Bien sûr les médias peuvent s’en faire écho, en soutien ou non, mais ici nous ne traitons que la procédure juridique qui n’a pas à en tenir compte.
Nous verrons, en l’occurrence, que le juge, en tout cas dans les affaires récentes, donne parfois raison à la société civile, mais sur des fondements qui contestent la « bonne » application des procédures scientifiques. Du coup ce qui est remis en cause ne se limite pas à des erreurs techniques. Certes, l’intégrité de l’agence ne sera pas questionnée, mais la décision laissera planer le doute (implicitement) de partialité, plutôt que d’incompétence.

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Notes

[1Il existe même des associations de juristes militants, au niveau européen, avec des antennes dans différents pays

[2Ils auraient une autre conception de la rigueur scientifique et des manières d’en tirer des conclusions

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