Question sur : Usines d’incinération d’ordures ménagères : risques et acceptabilité En réponse à :

Sujet : Usines d’incinération d’ordures ménagères : risques et acceptabilité

R�pondu le mercredi 22 février 2012 par Gasteuil Muriel

Dans la société de consommation actuelle, les déchets sont de plus en plus importants et de types de plus en plus complexes. Ces déchets doivent être gérés correctement afin d’éviter ou de réduire les nuisances et les atteintes sur la santé de l’homme.
Il existe actuellement en France deux techniques principales pour traiter les déchets :
- les décharges (citons ici le cas d’ENTRESSEN où les ordures s’entassaient à plus de 60 mètres de hauteur, rappelons que l’incinérateur de Fos a été créé afin de faire disparaître cette décharge à ciel ouvert, qui avait pour fonction de recueillir les déchets de la ville de Marseille). Ces décharges entrainent, outre des nuisances olfactives, une pollution des sols et par conséquent une contamination de l’eau et des produits consommables irrigués par cette eau contaminée.
- les UIOM (Unité d’incinération d’ordures ménagères), c’est le mode de traitement des déchets le plus utilisé en France (environ 130 incinérateurs en France actuellement).
L’incinération va produire à son tour des déchets, notamment les dioxines et les furanes qui sont suspectés pour leur potentiel cancérigène et tératogène. Les dioxines rejetées dans l’atmosphère retombent sur les végétaux et sur l’eau puis se retrouvent dans toute la chaine alimentaire.
Les effets des dioxines sur l’organisme humain ne sont ni directs ni immédiats, de plus leur nocivité est aggravée par le fait qu’elles ne sont pas dégradables dans la nature.
Aujourd’hui tout le monde sait que les incinérateurs produisent des dioxines et autres produits toxiques, d’où plusieurs réactions et questions des citoyens qui sont confrontés à l’installation d’un incinérateur dans leur environnement proche :
- Actuellement il n’y a pas, à proprement dit, de risque mesurable entre une population habitant prés d’un incinérateur et les autres, mais cela ne veut pas dire qu’il n’en n’existe pas.
Une étude sur les rejets de l’incinérateur de Besançon a montré l’augmentation du risque de développer un lymphome non-hodgkinien pour les personnes résidant à proximité d’un incinérateur. Mais il s’agit d’une étude isolée dont les résultats doivent être confirmés par de nouvelles études épidémiologiques. Cependant, cela contribue à maintenir la crainte des populations déjà sensibilisées.
- Les nouveaux incinérateurs d’ordures ménagères émettent moins de dioxines mais dans un même temps, il en faut extrêmement peu pour avoir des conséquences sur l’homme. En effet, les résidus de dioxine existent à des teneurs très faibles, de l’ordre du picogramme dans tous les produits d’origine animale, à des taux plus ou moins élevés.
Une exposition régulière à des concentrations très faibles sur une longue durée est jugée comme une situation à risque.
- La part d’inconnue est également extrêmement préoccupante. En effet, les scientifiques n’ont pas encore analysé la totalité des substances (de l’ordre du millier) qui s’échappent d’un incinérateur.
En effet, face à l’hétérogénéité de nos déchets, personne ne connaît ou n’a pu évaluer les interactions possibles entre les différents composants incinérés.
Tout ceci entraine chez le citoyen, des craintes et une grande méfiance envers les UIOM, d’où la naissance en France depuis quelques années, de forts mouvements d’opposition à l’installation d’incinérateurs, ces mouvements invoquent les risques sanitaires et environnementaux.
L’image de l’incinérateur est mauvaise.
Une étude a été réalisée par D4E sur « le Consentement local à payer et localisation d’un incinérateur ». Tout d’abord, cette étude ne va évaluer que les nuisances (cad les désagréments locaux tels que le bruit, les odeurs ou le trafic) ressenties par la population. L’étude contingente en question ne porte en aucun cas sur la pollution atmosphérique et ses risques pour la santé.
Face à la contestation, cette étude va mettre en avant deux éléments importants :
- le refus des citoyens reposerait sur le syndrome de NIMBY : « pas dans mon jardin, dans celui du voisin si vous voulez ». Selon cette interprétation, les riverains s’opposeraient catégoriquement à tout projet pouvant engendrer des nuisances ou représenter une menace pour leur environnement.
Le syndrome NIMBY désigne l’attitude des personnes qui veulent tirer profit des avantages d’une technologie moderne, mais qui refusent de subir dans leur environnement les nuisances qui en découlent. Les NIMBY essaient alors de transférer ces nuisances à d’autres membres de la société, ce qu’ils parviennent parfois à faire s’ils disposent d’un plus grand poids économique ou politique. Le résultat, c’est une concentration des industries polluantes et des nuisances dans les zones économiquement faibles, c’est le cas par exemple de Fos sur Mer ou de CHAMPLAN.
En définitif, nous pouvons dire que le syndrome de NIMBY se manifeste lorsque les intérêts particuliers s’opposent à l’intérêt général. Jusqu’à il y a quelques années, les grandes infrastructures (routes, voies ferrées, barrages, centrales nucléaires, incinérateurs…) étaient construites en vue de l’intérêt général et ces projets n’étaient jamais contestés par la population locale. Il serait bon de s’interroger sur ce changement d’attitude.
De plus, avec la décentralisation des pouvoirs, les élus locaux s’allient aux populations locales, car ils sont tenus pour responsables de la politique d’aménagement mais également de tout ce qui se passe sur leur territoire.
La mise en avant du syndrome de NIMBY est celle des aménageurs. Les citoyens s’opposent à un projet tout en reconnaissant sa validité et la nécessité de sa construction, il faut juste le « construire ailleurs », ils ne proposent pas de solution en échange.
- La deuxième idée de ce rapport est que « tout a un prix » et cette étude se propose d’évaluer économiquement les nuisances ressenties par les riverains.
Les aménageurs vont alors mettre en place plusieurs stratagèmes pour parvenir à leurs fins, ils vont instaurer des débats publics afin d’aboutir à une négociation mais également proposer des compensations financières pour pallier aux nuisances.

En conclusion, il est important de constater que ce syndrome de NIMBY se généralise et qu’il ne se limite plus à des installations jugées très polluantes ou très dangereuses, il concerne également maintenant les parcs éoliens, les prisons,… Ceci traduit la perte de confiance de la population à l’égard des décideurs politiques ou économiques et à l’égard des experts scientifiques. Des craintes apparaissent. Dans le cas de l’incinérateur, le rapport sur les « 65 questions réponses sur les incinérateurs et les dioxines » publié par l’INVS tente de remédier à cela en apportant des réponses simples et claires pour le citoyen soucieux de s’informer.


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