La gêne liée au bruit et ses multiples déterminants

Le bruit est une notion connotée négativement. Il s’agit d’une agression environnementale reconnue. De ce point de vue, la gêne a été proposé comme un des effets sanitaires lié au bruit, en accord avec la définition de la santé inscrite dans la constitution de l’OMS en 1947. Elle est censée capturer l’ensemble des réactions négatives face au bruit subi et ne peut être évaluée que par des questionnaires élaborés dans ce but.

De nombreuses études épidémiologiques se sont focalisées sur la gêne, au travers de larges enquêtes de terrain, parfois aussi en lien avec d’autres effets sanitaires. Le constat essentiel sur lequel s’accordent la quasi-totalité des auteurs concerne la grande variance des évaluations de la gêne par rapport aux mesures de l’exposition physique au bruit (mesurée en Lden p.ex.). Clairement, les différentes études ont mis en évidence une grande diversité entre les individus dans leur réponse en terme de gêne pour une exposition à un niveau de bruit donné. L’épidémiologie cherchant à comparer l’impact d’une agression (le bruit) sur un effet sanitaire (la gêne), surtout dans le cadre d’études transversales (la condition exposition-précède-effet n’est pas respectée), certains relèvent qu’elle a été traité de manière simpliste, voire comme une boîte noire. Evidemment, dans les études de terrain, il est possible de collecter des informations complémentaires, de manière à étudier leur impact modificateur sur la gêne exprimée. Dans cette logique, un certain nombre d’auteurs ont testé la capacité de tels facteurs à expliquer une partie de la variabilité de la gêne à exposition égale.

Fields, dès 1993, a mis en évidence 5 attitudes individuelles par rapport à la source du bruit ayant une influence sur la gêne : la peur du danger causé par cette source, la capacité d’y faire face et de se protéger, la sensibilité au bruit, la perception de l’importance de la source et la gêne ressentie par rapport aux nuisances non-sonores de cette source. Rainer Guski y a ajouté 4 déterminants sociaux : l’évaluation sociale de la source, la confiance ou la défiance envers les autorités responsables de cette source, l’historique de l’exposition au bruit et les prévision de la population exposée. Dans une étude portant sur une large compilation de données d’études de terrain qui incluaient la collecte d’informations démographiques et deux variables liées à l’attitude, la peur et la sensibilité au bruit, les auteurs confirment les conclusions de Fields sur le fort impact des descripteurs de l’attitude sur la gêne. L’impact des facteurs modificateurs sur la relation entre la gêne et le niveau sonore a été testé sous forme de différentes équations (voir encadré - première figure), le critère retenu étant l’amélioration du coefficient de régression qu’apporte l’introduction de chaque variable modificatrice sur la corrélation entre gêne exprimée et niveau d’exposition sonore. L’avantage de cette méthode réside dans le fait que l’effet modificateur peut être exprimé en unités de niveau sonore (dBA). Ainsi, la peur et la sensibilité produisent des effets équivalents à 19 et 11 dBA respectivement, contre 1 à 5 dBA pour les variables démographiques, qui ont toutes un effet statistiquement significatif à l’exclusion du sexe. Notons toutefois, que si cette démarche contribue indiscutablement à une meilleure description de ce qu’englobe la gêne, elle manque d’assise théorique de la conceptualisation de la gêne : p.ex. sens des relations causales, effets cumulés.

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