Un bref historique des maladies développementales

Le fait qu’aujourd’hui nous considérons que le développement fœtal constitue une phase particulièrement vulnérable relève de l’évidence ne doit pas nous faire oublier le fait que le concept est apparu il y a plus de 30 ans. L’histoire de la baie de Minamata en a été un épisode dramatique plein d’enseignements [1].

Notons que plus de 10 ans sont passés avant que ne soit reconnue la spécificité de la toxicité développementale. Sur le tableau ci-contre nous trouvons aussi d’autres moments clés, comme la découverte d’une forme de cancer extrêmement rare et touchant des filles à un âge anormalement jeune. Il s’agit d’une expérience grandeur nature de perturbation endocrinienne pendant le développement fœtal.

Cependant l’histoire la plus remarquable reste celle du plomb, au travers des investigations de bioindicateurs d’exposition et la longue connaissance de la toxicité du plomb (saturnisme). D’ailleurs, nous observons encore aujourd’hui des cas de saturnisme, dans des contextes de fortes contaminations (sols, aliments) et de logements insalubres (vieilles peintures). Pendant les années 70, la forte teneur environnementale en plomb, du fait de l’utilisation massive d’additifs de carburants, a conduit certains chercheurs à lancer l’alerte de possible effets neurotoxiques frappant les enfants. Une des découvertes qui a apporté de solides preuves a été la détermination de l’imprégantion corporelle cumulative en dosant le plomb dans les dents de lait. La charge en plomb a pu être corrélée à des symptômes de neurotoxicité, pour des concentrations dans l’air que l’industrie s’efforçait de prouver comme inoffensives. Le chercheur en pointe s’appelait J. Needleman. Il fut véritablement persécuté, y compris par son propre employeur, suite à des accusations de fraude (orchestrées) et de biais dans ses travaux [2].

Aujourd’hui, nous avons pu déterminer, dans le cadre de grandes cohortes, que les effets du plomb se manifestent à des doses bien plus faibles que les valeurs préconisées par les instances internationales, avec absence d’effet de seuil. Pour autant, le seuil de gestion reste toujours inchangé (plombémie de 100µg/L), alors que nous avons pris conscience que l’exposition à des concentrations modérées de plomb pendant des décennies n’a vraiment baissé que vers 2000, avec l’interdiction définitive des additifs. Des générations d’enfants ont donc subi les effets du plomb sur leur système nerveux en cours de développemen.

La liste des substances pouvant être à l’origine d’altérations plus ou moins irréversibles au cours des premières années de la vie s’est considérablement allongée.

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Notes

[1Ceux qui veulent avoir plus de détails peuvent lire le court texte de Philippe Grandjean (document joint

[2Une interview avec Herbert Needleman relate très bien les faits (second document joint)

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