Plus sur la relation entre génotoxicité et carcinogénicité

La 2,3,7,8-TCDD (principal congénère de dioxine) n’est pas mutagène et n’induit pas directement de lésions de l’ADN, contrairement à la capacité commune des agents génotoxiques (INSERM 2000).

Par contre cette même substance est classée en groupe 1 par l’IARC, c’est à dire cancérigène pour l’homme (IARC 1997) et en classe A (substance cancérigène pour l’homme) par l’EPA (IRIS, mars 2004).

Par définition, le caractère génotoxique est une bonne indication du potentiel cancérigène d’un agent. Cependant, il faut considérer que cette génotoxicité (ou la mutagénicité qui n’est qu’un cas particulier de génotoxicité) n’est ni nécessaire ni suffisante. Il existe des substances cancérigènes non génotoxiques, dont il faut expliquer les mécanismes d’action. D’un autre côté, compte tenu de la nécessité de plusieurs événements (altérations génétiques) avant que la cellule ne devienne pleinement cancéreuse, il y a probablement intervention de multiples facteurs.

Si on raisonne sur le schéma représentant les étapes de la cancérogénèse, il est possible de dégager deux types d’influence qui favoriseraient le processus :
- Le caractère génotoxique joue évidemment un rôle initiateur ;
- Toute modification des seuils de l’homéostasie, augmentation de la prolifération ou inhibition de la mort cellulaire programmée, crée les conditions favorables au développement d’un clone “initié” et donc augmente la probabilité de survenue de l’événement suivant.

C’est dans le cadre de ce schéma qu’il nous faut analyser certaines appellations du type cancérogène “complet”, ou au contraire co-cancérogène. Pour mieux illustrer ce point il nous faut utiliser les schémas classiques des modèles expérimentaux : des animaux de variété, âge et sexe donnés reçoivent différentes doses du produits à tester. Ils seront sacrifiés à des temps prédéterminés et tous leurs organes seront examinés à la recherche de lésions cancéreuses. Un cancérogène complet est capable, à lui tout seul, de provoquer l’apparition significative de cancers par rapport aux animaux témoins. Un co-cancérogène va potentialiser l’action d’un cancérogène, alors que s’il est administré seul il sera sans effet. L’expérience montre qu’il existe des agents non génotoxiques qui se comportent comme des cancérogènes complets, d’autres n’ayant qu’une fonction co-cancérigène. Nous pouvons expliquer cette situation en apparence paradoxale par le fait qu’un cancérogène complet non génotoxique perturbe très fortement l’homéostasie et favorise l’émergence d’un clone ayant subi une altération qui normalement serait confondue avec le bruit de fond (dommage spontanné, normalement contrôlé par les mécanismes cellulaires de réparation). Rappelons que toutes nos cellules subissent un certain nombre de lésions à chaque cycle, mais que celles-ci sont réparables par les puissants systémes enzymatiques prévus à cet effet. Ainsi, le taux de mutations par cellule et par cycle cellulaire reste faible, de l’ordre de 10-7.

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