Au-delà de l’analyse marginaliste de l’utilité et de ses prolongements directs d’un point de vue des agents pris individuellement, et concernant le choix du consommateur ou le choix du producteur, les néoclassiques vont également établir plus précisément les conditions d’un équilibre de marché. Un modèle uniforme de fixation des prix va effectivement se mettre en place, valable pour tous les marchés, comportant :
une fonction de demande décroissante par rapport aux prix et reposant sur le principe de l’utilité marginale décroissante ;
une fonction d’offre croissante par rapport aux prix et reposant sur la rareté et les rendements décroissants (ou les coûts croissants),
ces deux fonctions étant supposées indépendantes et les prix étant pour leur part supposés parfaitement flexibles à la hausse et à la baisse. Dès lors, un équilibre stable peut s’établir. On peut ajouter que le prix ainsi fixé par le marché reflète parfaitement, en raison même de la construction des fonctions d’offre et de demande, les préférences des individus. Il y a donc une homomorphie fondamentale entre les valeurs et les prix au regard des préférences et des goûts donnés des agents.
Ici, on perd nettement de vue, par rapport aux classiques, l’existence physique des biens, leur dimension matérielle, qui justifiait l’importance donnée par ces derniers à la théorie de la production. À partir des néoclassiques, un bien n’existe qu’à travers les flux d’utilité qu’il dispense aux agents économiques, et non par sa consistance matérielle. Ceci pose immédiatement la question du devenir des biens après qu’ils ont fini de dispenser aux agents leurs flux d’utilité, c’est-à-dire une fois « consommés ». Dans l’univers économique néoclassique, tout entier centré sur l’utilité, ils cessent tout simplement d’exister, alors qu’une vue matérialiste leur accorderait au moins l’existence sous forme de déchets. Ceci n’est pas sans intérêt pour comprendre pourquoi la théorie standard, centrée sur l’étude de la relation entre l’agent et les biens, s’est longtemps désintéressée de l’environnement, qui requiert au minimum une reconnaissance de l’aspect matériel de la production.
L’approche néoclassique pose donc la souveraineté de la sphère économique à travers le rôle régulateur du marché. Dans ces conditions, la plupart des économistes abordant l’environnement et les ressources naturelles dans la tradition néoclassique, n’ont de cesse de restaurer la confiance dans les mécanismes de marché afin d’assurer le meilleur usage possible de ces ressources et de ces biens d’environnement, à l’instar de ce qui se passe pour les autres biens et services. Le marché, à travers les changements de prix relatifs, fournit en effet un guide approprié pour l’allocation optimale des biens et services environnementaux.