récapitulatif : taxe ou norme pour internaliser les effets de la pollution ?

En définitive, la comparaison des éléments favorables à l’emploi des instruments réglementaires et à celui des instruments économiques peut s’établir selon le tableau suivant, tel qu’il avait été établi pour le Commissariat Général au Plan français en 1993 :

influence-circonstancesfavorable à l’emploi de la réglementationfavorable à l’emploi des instruments économiques
problème centraldéfinition d’une convention communeallocation d’une ressource rare
nombre d’agents concernés par l’allocationfaibleélevé
accès à l’informationconnaissance communeinformation asymétrique
biais stratégiques
forme de la courbe des dommagespente élevéepente faible
présence de seuilsbiais stratégiques
hétérogénéité des caractéristiques des agentsfaibleélevée
effet attendu de l’innovation techniquefaibleélevé
effet attendu de la normalisationélevéfaible

En réalité, les redevances forment le groupe d’instruments incitatifs le plus important. Elles agissent sur les prix et bénéficient d’une démonstration théorique de leur efficacité qui puise son origine dans la théorie du bien-être. Elles peuvent être classées en deux catégories selon des critères préétablis, notamment en ce qui concerne le choix de l’assiette fiscale :

- une taxe causale reflète le coût social en termes monétaires. Elle correspond théoriquement au coût écologique effectif. L’objectif de cette taxe est donc clairement l’internalisation des effets externes. Or, dans la pratique, il est difficile d’évaluer, même imparfaitement, tous les coûts sociaux. Souvent le montant de la taxe est déterminé par ajustements successifs ;

- une taxe incitative reflète ce processus d’approche d’une taxe causale « idéale ». Par tâtonnement, elle provoque un changement relatif des prix qui, à son tour, modifie le comportement des acteurs économiques vers un meilleur respect de l’environnement. Le montant de la taxe incitative est donc fixé en fonction de cet objectif. L’évitement des dommages environnementaux doit devenir moins coûteux que de payer la taxe.

En pratique, la taxe incitative est également difficile à appliquer, car elle combine l’effet incitatif avec un effet fiscal. Elle permet, soit d’augmenter les recettes fiscales, soit de remplacer la fiscalité traditionnelle. L’objectif financier représente un des obstacles majeurs à l’introduction d’une réforme fiscale écologique, malgré le fait qu’elle jouit d’un large soutien de principe.

Il y a deux manières de comprendre les difficultés de mise en œuvre que rencontrent les politiques fiscales environnementales :

- la première voit les obstacles plus dans la procédure que dans les modalités d’application ;

- la seconde se réfère plus fondamentalement à la base théorique, trop exclusivement économique, qui ne tient pas suffisamment compte du concept du développement durable défini en termes d’interactions entre l’économie, l’environnement et le social. Dans cette optique, c’est surtout dans la négligence du social que se trouvent les principales raisons de la réticence du public envers les politiques fiscales environnementales [1], le dernier exemple en date étant en France le débat sur l’élargissement du paiement de la taxe carbone aux ménages.

2 Messages de forum

  • A la lumière des réflexions à nous apportées par le cours, je doit avouer que le contexte socio-économique est un facteur force dans le choix des politiques. Par exemple, en Afrique, une politique tournée vers la taxation en matière d’environnement pourrait répondre à des impératifs fiscaux, ce qui est une bonne chose pour l’économie. Cependant, l’opinion publique ne saurait ’’tolérer’’ une telle démarche, les populations étant non instruites en majorité et pas/ ou trop peu (dans le meilleur des cas) sensibilisées aux questions ayant trait aux nuisances. Dans ce contexte, lorsque l’analyse révèle qu’il s’impose une taxation, on ne peut l’imposer qu’aux firmes, quitte à ce qu’elles la répercute sur les consommateurs !

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    • Je vous rassure, si l’on prend l’exemple de la France, la mise en œuvre d’une taxe (ou d’un impôt quelconque) est toujours mal vue sur le plan politique, puisqu’elle réduit les chances de celui qui l’impose de se voir réélire. Les contradictions entre les modèles issus de la science économiques et les modèles issus de la science politique rentrent plutôt en contradiction ! Il y a une théorie en économie qui regroupe ces deux visions, c’est celle dite du "public choice", : très schématiquement, on peut dire que comme les préférences individuelles ne peuvent être agrégées collectivement, et donc, comme aucun responsable ne peut prendre de décisions qui représenteraient le choix collectif, aucune n’est prise in fine, de manière à ne choquer personne et de maximiser ainsi les chances de réélection (je caricature un peu).

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Notes

[1Fiorino DJ., 1995, Making Environmental Policy, Berkeley : University of California Press.

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